Le costard au cinéma

Le vêtement, reflet de la personnalité ?

A partir du Second Empire, la mode masculine tend à s'assombrir. A l'aube du siècle suivant apparaît le costume masculin. Le jour, le pantalon et le gilet se portent de préférence noirs, la chemise est fermée au col par une cravate nouée, la redingote croisée. Le soir, le costume se transforme en smoking, composé d'un pantalon, d'un gilet et d'un veston.
Les avis divergent quant au créateur du smoking. Pour les uns, cet ensemble aurait été inventé par Henry Poole, tailleur du roi Edouard VII (1841-1910). Pour les autres, ce serait Pierre Lorillard IV, membre d'une riche famille de New York City possédant une propriété du nom de Tuxedo Park, qui aurait lancé la mode du tuxedo en octobre 1886.

Quoi qu'il en soit, au cinéma, le complet, familièrement appelé costard, est une pièce-maîtresse. Classe et classique, sobre, généralement assorti d'une chemise blanche et d'une cravate, le costard fait corps avec le personnage. Dans les années 1940-1950, Cary Grant se fait l'icône du costume, tant au cinéma que dans la vie. Il représente le gentleman par excellence.

Depuis 2005, le représentant du costard n'est autre que Barney Stinson (Neil Patrick Harris) de la série américaine How I met your mother. 

Il est une duplicité inhérente au costard, et dans les films, l'habit ne fait décidément pas le moine. Des années 1930 au XXIe siècle, le costard, signe de rigueur professionnelle ou marqueur d'appartenance sociale, habille les héros les plus vertueux comme les plus vicieux.

Pete Warne, inoubliable Clark Gable, a beau être un journaliste au chômage, il n'en reste pas moins élégant. 
New York-Miami, de Frank Capra (1934)
T.R Devlin, agent secret américain, va sauver la belle Alicia des mânes allemandes.
Les Enchaînés, d'Alfred Hitchock (1946)
Fernand Naudin et sa bande de truands vont à la messe en costume-cravate pour expier leurs péchés.
Les tontons flingueurs, de Georges Lautner (1963)
Le costard est ici plus que jamais signe de rigueur. Sous cette apparence soignée et lisse, derrière ce regard impassible, Jeff Costello cache un Samouraï  froid et sans scrupules. 
Le Samouraï, de Jean-Pierre Melville (1967)
Veste noire et cravate bleu ciel, telle est la panoplie de ces wiseguys. 
Les affranchis, de Martin Scorsese (1990)
Veste cintrée, cravate fine, chemise blanche impeccable. Sous leur apparence soignée, ces gentlemen cambrioleurs sont de véritables brutes.
Reservoir dogs de Quentin Tarantino (1992) 
Quentin Tarantino aime que ses malfrats de héros revêtent un beau costard pour mieux le salir ensuite. Espérons que Vincent Vega et Jules Winnfield aient une bonne marque de lessive...
Pulp fiction, de Quentin Tarantino (1994)

Enfin des héros vertueux en costard ! Chemise blanche et noeud pap impeccables, veste noire et lunettes assorties, l'agent K et l'agent J protègent la Terre des aliens avec classe...ou pas.
Men in black, de Barry Sonnenfeld (1997)

Patrick Bateman a beau porter un costume taillé sur mesure, il n'en reste pas moins un grand psychopathe.
American Psycho de Mary Harron (2000)
Chris Wilton est un garçon bien, issue d'une famille modeste. Il n'aspire qu'à une chose : gravir l'échelle sociale. Seule ombre au tableau ? sa liaison avec Nola, qu'il tue sans scrupules ni remords. 
Match Point, de Woody Allen (2005)
Sam Rogers porte une grosse cravate à l'image de son compte en banque. Quant à Peter Sullivan, il a la cravate de travers... serait-ce donc la crise ?
Margin Call, de J.C Chandor (2012)

Au cinéma, force est de constater que le costard habille davantage les truands, les assassins, ou les magnats de la finance sans scrupules que les héros honnêtes. Garant d'une apparence policée, le costard ne fait que revêtir les passions qu'il vaut mieux dissimuler.