Dolan Anyways
Après le savoureux J'ai tué ma mère et l'élégant Les amours imaginaires, Xavier Dolan livre un troisième bijou cinématographique serti d'images oniriques, de souffle lyrique et de répliques exquises.
Avec Laurence anyways, le cinéaste québécois explore la question de genre, en mêlant subtilement l'identité à l'amour. Si la passion de Laurence pour Fred n'a pas de frontière, l'amour de cette dernière est en revanche faillible, borné aux limites du genre. Fred est happée malgré elle par ses préjugés. Tout au long du film, elle voudra se donner encore à Laurence mais n'y parviendra plus.
Dans ce film, tout est désir. D'aimer, de voir, de comprendre et de saisir. Nombreux sont donc les cris de ces coeurs révoltés confrontés à eux-mêmes et à une société sclérosée. Melvil Poupaud et Suzanne Clément sont remarquables. Lui, d'insolence et de beauté. Elle, de rage et d'incandescence.
Derrière cette difficile question du genre, Xavier Dolan sonde l'être humain tiraillé par ses vicissitudes. Les plans contemplatifs du film sont autant de moments suspendus stimulant la réflexion du spectateur. La célèbre strophe du "Lac" de Lamartine :
Ô temps ! suspends ton vol ! et vous, heures propices,
Suspendez votre cours !
Laissez-nous savourer les rapides délices
Des plus beaux de nos jours !
pourrait être citée en exergue de l'oeuvre. Laurence anyways est comme une longue méditation sur la fragilité de l'humain, l'inéluctabilité du temps et l'impuissance à revivre nos souvenirs.
Déroutant, bouleversant, Laurence anyways n'en finit pas de nous troubler.