Master Class de Bertrand Tavernier
Master Class de Bertrand Tavernier
James Gray, Gérard Depardieu, Jacques Audiard, Francis Ford Coppola, Isabelle Huppert, Alain Cavalier, Jean-Pierre et Luc Dardenne, Barbet Schroeder...Chaque mois un cinéaste ou un comédien renommé s'entretient avec Pascal Mérigeau et évoque, images à l'appui, son parcours, ses aspirations artistiques, sa vision du monde.
Dimanche 02 mai, à 17h, c'est Bertrand Tavernier, trente-cinq ans de carrière derrière lui et une vingtaine de films à son actif, qui est venu évoquer son parcours et sa conception du cinéma le temps d'une Master class au Forum des Images. La conférence était animée par Pascal Mérigeau.
Introduction au cinéma de Bertrand Tavernier
Les films de Bertrand Tavernier ne laissent pas tellement de place au hasard. Souvent le cinéaste revient sur des sujets traités plus tôt. Les thèmes abordés dans Une semaine de vacances se retrouvent dans ça commence aujourd'hui. Mais Bertrand Tavernier aime aussi chercher "autre chose", explorer l'inconnu, comme le lui permet le documentaire. Sa connaissance d'abord superficielle augmente en traitant à fond le sujet. C'est le cas de la guerre d'Algérie et de la guerre sans nom.
D'autre part, le cinéma de Bertrand Tavernier puise à la fois dans la littérature et le théâtre. Jean Vilar, acteur, metteur en scène et directeur de théâtre, a beaucoup influencé l'homme et lui a donné le goût de la langue, tout comme Marivaux, Lope de Vega, Calderon ou encore Brecht. C'est aussi grâce à son père, dévoreur de livres, que le cinéaste prise autant la littérature.
Quel désir le pousse à adapter un livre au cinéma ? il faut qu'un livre combine d'abord plusieurs choses. Un élément déclencheur sera à l'origine de la transposition. On part de romans, on les détruits pour mieux les rebâtir. Aussi adapter n'est-il pas recopier mais "prendre ce qui touche et le restituer". C'est ce que le réalisateur a fait avec Capitaine Conan.
Bertrand Tavernier et le cinéma américain
Le cinéaste a débuté comme journaliste dans les années 1959-1960. Comme il n'y avait pas de volontaire pour parler du cinéma américain en France, la guerre froide étant une des conséquences de ce rejet, c'est Bertrand Tavernier qui s'en est fait le défenseur. Entre amis ils allaient souvent aux rétrospectives Duvivier.
Ce qu'il a remarqué, c'est qu'aux Etats-Unis, les grands réalisateurs ont des rapports forts avec leur scénariste. C'est pourquoi le cinéaste privilégie ses relations avec ses scénaristes, notamment avec Jean Cosmos et Jean Aurenche. Il feint de ne pas avoir assez de talent pour écrire tout seul. Il fait donc appel à de grands scénaristes qui comblent sa peur de la page blanche.
Il puise ainsi dans le cinéma américain pour adapter leur réalité à la réalité française. Il ne copie jamais. Il a également travaillé sur l'espace, il a appris à "dramatiser" l'espace, spécialité américaine. La Princesse de Montpensier, qui sortira prochainement, en compétition officielle au Festival de Cannes, témoigne de cette admiration pour le cinéma américain qui voue un véritable amour à la valeur dramatique de l'espace.
Premier extrait de la Master Class : Coup de torchon, 1981, avant-dernière séquence.
Le ciret noir que Isabelle Huppert est un clin d'oeil à Quai des Brumes. Le film a été entièrement tourné au Sénégal. Pour le tournage, Bertrand Tavernier a revu des films coloniaux français où l'action importante est toujours au centre de l'image. Si le film a pu être produit, c'est grâce à la scène du "congrès des chiens" dite par Philippe Noiret, scène très drôle et triviale.
Pour le rôle, Philippe Noiret a travaillé comme s'il ne savait jamais d'avance si Cordier était calculateur ou fou. Il jouait la scène comme s'il n'avait pas joué ce personnage auparavant.
Deuxième extrait : La vie et rien d'autre
La fin du film ne correspond pas à la fin du scénario. Le projet de lettre a été finalement tourné chez Philippe Noiret près de Carcassonne. La gare, ou plutôt l'absence de gare, a été entièrement construite. C'est un décor organique.
Le passage de l'écrit au film
La voix-off est un artifice très fort pour Tavernier, sauf quand elle est explicative. Quant à la musique, elle doit trouver un ton et ne pas tomber dans le pléonasme. Son rôle est de faire sentir les émotions.
Troisième extrait : Dans la brume électrique
Les personnages comptent plus que l'intrigue. D'ailleurs en Louisiane, on développe un intérêt pour le moindre individu. Le film allie Histoire et époque contemporaine. Les Etats-Unis sont hantés par les fantômes. Le Sud est une terre gorgée de sang entre l'enfer et le ciel. On retrouve ossements et douilles partout.